Les émissions quotidiennes de Radio France Internationale en allemand pourraient bientôt disparaître, du fait de la nouvelle stratégie de « L´audiovisuel extérieur français ». Sous prétexte d´audience insuffisante, Radio France Internationale (RFI) a annoncé son souhait d´arrêter la diffusion de ses programmes en allemand, polonais, albanais, serbo-croate, turc et laotien. Les programmes en russe, chinois, persan et vietnamien seront limités désormais à Internet. Donner la priorité au web dans des pays où l´information est strictement filtrée par les gouvernements, relève au mieux de l´inconsciente négligence, au pire du cynisme. RFI veut mettre l´accent sur d´autres langues : le français, l´anglais, le « portugais-brésilien », l´espagnol, le haoussa et le swahili. Ce projet a été présenté au comité d´entreprise le 24 octobre 2008 par M. de Pouzilhac et Mme Ockrent, respectivement président et directrice générale de France Monde, le nouveau groupe dont dépend RFI et qui coordonne aussi TV5 Monde et France 24. La rédaction allemande de RFI, basée à Paris depuis janvier 1945, réalise deux heures d´émissions quotidiennes en allemand pendant la semaine et une heure le week-end. Il est étonnant de voir que c'est pendant la période de présidence française de l´Union Européenne qu'est née l'idée de vouloir supprimer ce lien entre les deux pays piliers de l´Union. La rédaction allemande contribue à la construction de l´Europe, au dialogue entre Allemands et Français, puisqu´elle participe au réseau radio et internet « Euranet », programme subventionné par l´UE. RFI est aussi un média français très présent en Allemagne, seul pays européen qui possède un club d´auditeurs RFI, et qui compte plus de 1000 membres. RFI offre une vision française qui permet de dépasser les clichés allemands sur la France. Par ailleurs, face au recul de la francophonie, les émissions en français ne peuvent pas toucher un large public allemand. Le maintien de la rédaction allemande semble primordial pour entretenir les relations bilatérales. Certains responsables politiques et des auditeurs se mobilisent. Andreas Schockenhoff, vice-président du groupe parlementaire CDU-CSU et président du groupe d´amitié interparlementaire franco-allemande, contacté par La Gazette, ne souhaite pas commenter une décision qu´il estime ne relever que du seul diffuseur. Cependant, Angelica Schwall-Düren, vice-présidente du groupe parlemantaire SPD, annonce à La Gazette qu´elle a écrit une lettre à la direction de RFI car elle trouve cette mesure particulièrement regrettable. C´est le cas aussi du maire de Berlin, Klaus Wowereit, plenipotentiaire pour les affaires culturelles franco-allemandes, qui demande à RFI le maintien des émissions en allemand. Quant à Loïc Hervouet, soucieux de conserver son impartialité de médiateur de RFI, confie que « pour autant, dans le maintien du lien de confiance avec les auditeurs, j´ai eu l´occasion de faire valoir qu´une information plus précoce et plus détaillée aurait été nécessaire ». Mme Zarnt, responsable des affaires juridiques du Medienanstalt Berlin-Brandenburg (mabb), a appris par La Gazette les menaces pesant sur RFI. Elle confirme que, selon la licence de RFI, la diffusion de programmes en allemand est l´une des conditions du droit d'émission. Ainsi, la rédaction française de Berlin, diffusant des émissions en français, est menacée de fermeture. La majorité des filiales à l´étranger devraient aussi mettre les clés sous la porte, à l´exception de la rédaction de RFI Roumanie. Celle-ci est maintenue « au nom de la francophonie », argument qui devrait aussi être valable pour l´Allemagne. Si la direction maintient son projet, une cinquantaine de salariés seront licenciés en 2009. Dans le service allemand, ce sont cinq salariés et dix pigistes qui se retrouveraient sans emploi. Depuis le 12 mai, le personnel est en grève.