Venezuela : litige autour d'un magot stocké en Angleterre
Le bras de fer entre Nicolás Maduro, président contesté, et Juan Guaidó, président par intérim, ne fléchirait pas pour tout l’or du monde. Surtout pour celui du Venezuela, ces 31 tonnes d’or, qui dorment dans les coffres de la Banque centrale anglaise. L’équivalent de près d’un milliard d’euros, dont les deux hommes politiques se disputent la paternité.
Ce lundi 20 décembre, la Cour suprême britannique a renvoyé l’affaire de l’or vénézuélien devant le tribunal de Commerce. Une décision qui fait suite à un appel de Juan Guaidó, qui contestait la reconnaissance de Maduro comme président du Venezuela par un précédent jugement. «Les tribunaux britanniques refuseront de reconnaître tout jugement d’une juridiction étrangère, comme ceux de la Cour suprême du Venezuela, s’ils sont en conflit avec notre politique nationale» peut-on lire dans le communiqué publié par la Cour suprême britannique, dans laquelle elle motive cette décision.
C’est une véritable course au trésor entre les deux hommes forts du Venezuela qui dure depuis plus d’un an. Et un casse-tête pour la Banque centrale britannique, qui se retrouve à jouer le rôle d’arbitre. Depuis janvier 2019, le pouvoir vénézuélien est disputé entre Nicolás Maduro et Juan Guaidó. Quelques mois après la réélection contestée de Maduro, au pouvoir depuis 2013, Guaidó se proclame «président par intérim» en janvier 2019. Il bénéficie alors du soutien d’une cinquantaine d’États étrangers, dont la France et le Royaume-Uni. Un imbroglio juridique
Depuis, le Venezuela est un pays à deux têtes, du moins au plan juridique et vu de l’étranger. Car en interne le président Maduro tient les rênes du pays d’une main de fer et l’étoile d’opposant de Guaido a singulièrement pali, y compris auprès de ses partisans. L’un comme l’autre réclament l’accès à l’or vénézuélien stocké dans les coffres de la Banque d’Angleterre. D’abord par le biais du gouvernement de Caracas, sous la houlette de Nicolás Maduro. Dès le début de la crise sanitaire en 2020, il dit vouloir récupérer ces fonds pour les vendre, et ainsi disposer d’une manne économique pour lutter contre l’épidémie de Covid-19. Il avait déjà fait une demande similaire auprès de Londres en 2018, sans succès. La seconde reste également sans effet. Alors, Caracas dépose une plainte devant la Haute Cour de justice britannique, plus haute juridiction du pays, accusant l’Angleterre «d’empêcher le Venezuela de faire face à une situation d’urgence sanitaire».
En juillet 2020, la justice britannique rend un premier verdict : Juan Guaidó serait le bénéficiaire légitime puisqu’il est reconnu comme «président par intérim» par Londres. Mais la décision est annulée quelques mois plus tard par la Cour d’appel de Londres, relançant le débat. Le 28 janvier dernier, c’est au tour de Juan Guaidó de réclamer l’accès à l’or vénézuélien. En tant que «président par intérim», il estime disposer de la souveraineté qui lui confère ce droit. Une partie de la crise politico-économique du Venezuela se joue désormais à plus de 7 000 kilomètres de Caracas.