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Différences : le blog de Jean-Louis BOEHLER
15 février 2023

Slovaquie : découverte d'une trentaine de corps décapités datant du néolithique

Plusieurs trentaines de squelettes ont été découverts par des archéologues en Slovaquie sur un site néolithique.

slovaquieC’est une découverte qui pourrait faire basculer l’idée que se faisaient les historiens de la vie des hommes à l’époque du néolithique. Une trentaine de squelettes sans tête ont été retrouvés par des archéologues dans une fosse sur le site de Vrable, dans l’ouest de la Slovaquie, relate Sciences et Avenir. Le site, qui abritait l’une des plus importantes colonies du néolithique en Europe centrale, fait l’objet de fouilles archéologiques depuis une dizaine d’années.

Jusqu’à présent, les archéologues et les historiens s’étaient plutôt faits à l’idée de conditions de vie paisibles dans cette zone, où plus de 300 maisons ont été identifiées. La population de cette colonie a ainsi été estimée à environ 590 habitants à l’époque. La découverte de cette trentaine de corps décapités a surpris les archéologues, qui n’imaginaient pas qu’une telle violence ait pu se produire à l’époque à cet endroit.

Les corps jetés dans la fosse ?

Dans la fosse, ce sont une trentaine de squelettes qui ont été mis au jour, dont celui d’un enfant, ce dernier étant le seul pour lequel la tête a été conservée. Deux types de dépôt ont été identifiés, avec un premier où les corps ont été disposés par paires ou par trois, au niveau des passages pour franchir le fossé. Sur certains de ces corps, ce sont également les mains et les pieds qui ont été coupés. Pour le deuxième type de dépôt, les squelettes ont été retrouvés dans des positions très différentes, suggérant le fait qu’ils ont pu être jetés dans la fosse. Un traitement réservé aux défunts plutôt inhabituel pour l’époque.

Des massacres ou un culte des morts ?

Pour les chercheurs, il reste maintenant à faire la lumière sur le sort de ces personnes. Les squelettes sont difficilement identifiables en raison de l’absence du crâne. Un premier examen des squelettes a néanmoins permis de fournir un élément important. La première vertèbre cervicale est toujours présente, ce qui exclurait l’hypothèse d’une brusque décapitation. Selon les chercheurs, les têtes auraient pu être soigneusement décollées des corps plusieurs semaines après le décès, une fois la décomposition amorcée. D’autres examens anthropologiques doivent avoir lieu pour obtenir plus d’informations, notamment sur l’âge au moment de la mort ou sur de potentiels liens de parenté entre certains corps.

Plusieurs hypothèses ont été émises pour tenter d’expliquer le sort de l’ensemble de ces personnes. Il a notamment été évoqué de possibles massacres commis lors d’un conflit, de sacrifices ou encore d’un culte des morts où les crânes auraient été utilisés. Certains chercheurs avancent que l’augmentation de la population sur le site a pu engendrer une diminution des ressources, entraînant des rivalités, voire des conflits. Récemment, une étude avait apporté la preuve de nombreuses violences à l’époque du néolithique en Europe de l’ouest, comme en témoignaient notamment des blessures au niveau du crâne sur de nombreux restes humains mis au jour. (selon "GEO")

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5 janvier 2023

Comment la sécheresse a fait tomber la capitale maya

Elle fut la capitale de la culture et de la politique du peuple maya de la péninsule du Yucatán aux XIIIe et XIVe siècles de notre ère. La cité Mayapán se serait ensuite effondrée à cause d'un épisode de sécheresse particulièrement intense. Les chercheurs s'interrogent : doit-on s'attendre à un effondrement similaire aujourd'hui ?

maya1Fondée en 1050, la cité Mayapán, qui signifie littéralement « drapeau des Mayas », fut la capitale du peuple maya durant un peu plus de deux décennies. Mais un épisode de sécheresse intense aura raison de cette immense cité, épisode qu'ont analysé des chercheurs dans une étude en libre-accès publiée dans la revue "Nature communications". Leur but : étudier les conséquences d'un dérèglement climatique sur une population humaine. Pour cela, ils se sont concentrés sur la péninsule du Yucatán, au sud-est du Mexique, et le cataclysme qui s'y est déroulé au XVe siècle. Elle a abrité durant environ quatre siècles la population maya de la période post-classique, c'est-à-dire de 900 jusqu'à l'arrivée des Espagnols au XVIe siècle.

Mais, au XVe siècle, la répartition du peuple maya a commencé à changer : les habitants se sont disséminés de la capitale à un effondrement de la ville. Pour s'en assurer, ils ont utilisé une « approche transdisciplinaire qui combine des ensembles de données archéologiques, historiques et paléoclimatiques pour examiner les interactions dynamiques du changement climatique, des conflits civils et de l'effondrement politique à Mayapán au cours des XIVe et XVe siècles de notre ale vers des régions moins peuplées, et la capitale a été petit à petit désertée. Un phénomène causé, selon les chercheurs, par un dérèglement climatique dans le Yucatán, qui a ensuite engendré une succession de conséquences menanère. »

Une véritable réaction en chaîne

Grâce aux données, aux échantillons et ossements recueillis directement sur place puis analysés et datés, les chercheurs sont parvenus à retracer la fin de l'histoire de Mayapán. Ils ont noté un déclin de la population à partir de 1350, alors qu'elle ne cessait d'augmenter jusqu'ici, avec un niveau au plus bas en 1450. Au même moment, des épisodes de sécheresse ont été répertoriés : « Nous trouvons une relation significative entre la sécheresse et le déclin de la population lorsque nous examinons la période entre 1350 et 1430, c'est-à-dire le moment où le déclin de population le plus important s'est produit », écrivent les chercheurs.

Ces manques d'eau ont ensuite créé comme une réaction en chaîne, décrite dans l'étude : « Les périodes sèches prolongées de la période coloniale ont provoqué des mauvaises récoltes bien documentées, de graves famines et une mortalité élevée qui ont déstabilisé l'économie et conduit à la dispersion périodique des populations des villes du nord du Yucatán ». 

En plus du phénomène d'exode rurale, la sécheresse a aussi provoqué une aggravation de conflits politiques déjà présents, entre les différentes familles riches qui dominaient la ville. Les fosses communes fouillées en bas du temple principal emblématique de la ville contenaient d'ailleurs plusieurs personnes appartenant à la famille des chefs d'État, les Cocom, suggérant une rivalité qui s'est concrétisée en conflits civils durant la dissolution progressive de la ville.

En a, le plan de la ville montrant les complexes d'habitation, le mur défensif, les portes formelles et les emplacements des prélèvements de squelette (points rouges). En b, différentes configurations des murs extérieurs, tels qu'ils auraient pu être avant l'effondrement de la ville. En c, une coupe transversale de la construction à plusieurs niveaux du mur entourant la ville. © <em>Nature communications</em>, Kennett, D.J., Masson, M., Lope, C.P. et <em>al.</em>
En a, le plan de la ville montrant les complexes d'habitation, le mur défensif, les portes formelles et les emplacements des prélèvements de squelette (points rouges). En b, différentes configurations des murs extérieurs, tels qu'ils auraient pu être avant l'effondrement de la ville. En c, une coupe transversale de la construction à plusieurs niveaux du mur entourant la ville. © Nature communications, Kennett, D.J., Masson, M., Lope, C.P. et al.
Une image de ce qui nous attend à l'avenir ?
Finalement, cette étude se concentre aussi sur la résilience du peuple maya face aux aléas climatiques et environnementaux. Car, comme l'expliquent les chercheurs, « les traditions économiques, sociales et religieuses ont persisté jusqu'au début de la domination espagnole, malgré l'échelle réduite des unités politiques, attestant d'un système résilient d'adaptations homme-environnement ». Ils citent notamment la mobilité des habitants, qui leur a permis de se disperser, donc d'avoir des besoins agricoles eux aussi dispersés. « Les archives archéologiques et historiques sont bien adaptées pour examiner les effets sociétaux passés des crises climatiques sur des cycles à long terme », écrivent les chercheurs.

Mais si l'adaptation du peuple maya face aux sécheresses est un exemple de résilience climatique, ce qui nous attend promet bien plus de difficultés. D'abord parce que les changements se produisent à une échelle bien plus grande, et parce qu'ils sont plus définitifs que dans le cas des longs épisodes de sécheresse. Les chercheurs s'en inquiètent, car « les influences anthropiques actuelles et futures devraient amplifier la gravité des événements extrêmes dans le cycle de l'eau et conduire à des sécheresses plus intenses et prolongées que celles qui ont eu un impact sur la productivité agricole dans le passé ». Ils concluent sur la situation actuelle au Mexique et en Amérique centrale, où la sécheresse est déjà préoccupante et crée une insécurité alimentaire, qui entraîne à son tour des « troubles sociaux et des migrations ». Et leurs craintes sont projetables dans d'autres régions du monde, comme en Europe où de nombreux records de sécheresse et de chaleur ont été battus cet été 2022. (selon "Futura")

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7 décembre 2022

Epaves sur la côte de l’Australie-Occidentale

De l'ombre au triangle des Bermudes !

australie2Au moins 1 600 épaves, et d’innombrables histoires de pirates et de pillage, reposent au large de cette région, sous les eaux de l’océan Indien. Aujourd’hui, les explorateurs marins plongent pour révéler leurs secrets.

La côte de l’Australie Occidentale, longue de plus de 12 800 km, est jonchée d’au moins 1 600 épaves, ce qui est plus que tout les autres États. Ces débris attirent désormais les touristes, passionnent les plongeurs et fascinent les scientifiques.

Avec une superficie de quatre fois la France, mais ne comptant que 2,6 millions d'habitants, l’Australie-Occidentale ne reçoit que peu de touristes en comparaison à la côte est du pays, plus développée et où se situent Sydney et Melbourne. Perth, la capitale de l’État, est située à plus de 2 000 km de la ville la plus proche, Adélaïde.

Pour celles et ceux qui voyagent jusqu’à cette région, certains des sites les plus attrayants se situent au large de ses côtes, cachés sous les vagues de l’océan Indien. Là-bas, des épaves peuvent être trouvées partout, des plages de la ville aux parcs marins les plus éloignés. Elles servent de sujet principal à Chasseurs d'épaves Australie, une nouvelle série documentaire en six épisodes. En plus de former de superbes sites de plongée, ces ruines sous-marines révèlent des courants surprenants de l’histoire maritime de l’Australie-Occidentale.

LA CÔTE AUX ÉPAVES

Depuis les années 1600, cette côte est devenue un véritable cimetière pour les navires néerlandais, britanniques et portugais, explique Ross Anderson, conservateur de l’archéologie maritime au Western Australia Museum. De nombreux navires ont péri sur la route des quarantièmes rugissants entre l’Europe et l’Indonésie. Ils se sont aventurés trop loin à l’est, dans les eaux dangereuses de l’Australie-Occidentale, qui regorgent de pièges naturels : marées extrêmes, récifs peu profonds au large, falaises imposantes et conditions météorologiques périlleuses.

Les médias australiens se sont concentrés sur la recherche de ces navires, qui n’ont été retrouvés qu’en 2008, à plus de 280 km à l’ouest de la ville de Carnarvon, dans la région. « Le Sydney et le Kormoran ont été difficiles à trouver en raison de la profondeur des épaves (plus de 2 km) et des difficultés à calculer l’endroit où les navires ont finalement sombré », explique M. Paterson.

Si cet accident a été la pire catastrophe océanique de l’Australie-Occidentale, le Batavia en a été la plus macabre. Ce navire néerlandais à destination de l’Indonésie transportait plus de 300 personnes et de nombreuses richesses lorsqu’il a heurté un récif et coulé dans les îles Houtman Abrolhos de la région en 1629.

Environ 250 passagers du Batavia ont réussi à survivre, sur trois petites îles. Parmi eux se trouvaient des meurtriers comploteurs. Quelques semaines auparavant, le capitaine du Batavia et le sous-marchand avaient élaboré un plan pour s’emparer du navire, voler sa prime et devenir des pirates. Plus de 120 survivants de l’épave ont été massacrés par ces hommes et leurs sous-fifres.

Les touristes peuvent plonger ou faire du snorkelling autour de cette épave en conduisant cinq heures au nord de Perth, à Geraldton, puis en faisant une excursion en bateau sur les îles Houtman Abrolhos, à 88 km à l’ouest. Les vestiges du Batavia gisent à tout juste 4,8 mètres de profondeur. Ils peuvent aussi être explorés virtuellement grâce à Batavia 1629, un livre électronique interactif et gratuit du WA Museum. Il utilise des photos, des modèles 3D et des animations pour illustrer le voyage fatal du navire.

Une autre épave accessible en plongée dans les îles Abrolhos a inspiré Ash Sutton, membre de la série Chasseurs d’épaves Australie. Le bateau a tenté de survivre contre vents et marées. Zeewijk, un navire néerlandais, a coulé en 1726. Toutefois, 82 de ses 208 passagers ont miraculeusement réussi à atteindre l’Indonésie sur un bateau de fortune.

« Certains des marins du [Zeewijk] ont vécu sur l’épave du navire elle-même alors qu’elle était perchée sur un récif », raconte M. Sutton, qui vit désormais sur les îles Houtman Abrolhos. « C’est l’une des histoires les plus impressionnantes que j’ai entendues. »

 DES MYSTÈRES ENGLOUTIS

Les touristes n’ont pas besoin de quitter Perth pour plonger dans l’histoire maritime de l’État, assure Jeremy Green, archéologue marin. L’épave britannique Omeo, coulée en 1905, repose à tout juste 24 mètres des côtes, dans les eaux turquoise de Coogee Beach. Elle fait partie du Coogee Maritime Trail, un itinéraire de snorkelling long de 228 mètres embelli par des récifs artificiels et des sculptures immergées.

D’autres épaves se trouvent à 16 km au nord-ouest de l’Omeo, à Rottnest Island, une destination touristique populaire. Ce havre sans voiture est entouré de plages paradisiaques, de vagues et de récifs coralliens, lesquels ont coulé une douzaine de navires au cours des deux derniers siècles. Ces ruines sont taillées sur mesure pour la plongée, en raison de l’eau translucide, des faibles profondeurs et de la présence de 25 espèces de coraux tropicaux.

Ce que les touristes ne peuvent pas explorer, c’est le SS Koombana. Il n’a jamais été retrouvé. Ce paquebot de luxe, semblable au Titanic, transportait plus de 150 personnes entre Port Hedland et Broome, dans l’extrême nord de l’Australie-Occidentale, lorsqu’il a disparu dans les tourbillons d’un cyclone en 1912.

« Plusieurs tentatives pour trouver le lieu de repos final du Koombana ont été menées au cours des décennies et la découverte de l’épave est un mystère maritime exceptionnel que nous aimerions résoudre », déclare Ross Anderson.

Plus de 400 ans après être devenue un gigantesque cimetière océanique, l’Australie-Occidentale recèle encore des secrets des mers.

 L’erreur humaine a été la cause du premier naufrage de l’Australie-Occidentale, enregistré il y a 400 ans. Les visiteurs du WA Shipwrecks Museum à Perth peuvent admirer un canon en fonte récupéré sur ce navire, le Trial, qui a coulé à une centaine de kilomètres à l’ouest de la ville de Karratha, dans le nord de l’État, en 1622. Ils peuvent également découvrir son histoire affolante.

En provenance d’Angleterre et à destination de l’Indonésie, le Trial a dévié de sa route, a heurté des rochers et a coulé. Plus d’une centaine des membres de l'équipage a été aspirée par les eaux. John Brookes, capitaine du navire et un des 36 survivants, a menti sur sa disparition pour dissimuler sa négligence. Selon Alistair Paterson, professeur d’archéologie à l’université d’Australie-Occidentale, ce faux récit a caché le lieu de repos du Trial pendant trois siècles.

Un endroit tout aussi éloigné a protégé le secret du plus grand mystère maritime de l’Australie. Le WA Maritime Museum de Perth explique aux visiteurs comment une bataille acharnée de la Seconde Guerre mondiale entre le HSK Kormoran allemand et le HMAS Sydney II australien a mené au naufrage des deux navires de guerre, tuant 645 membres d’équipage australiens et plus de 70 Allemands en 1941. (selon "National Geographic" - traduit de l'anglais)

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3 novembre 2022

Allemagne : comment est né le Bade-Wurtemberg

Land allemand frontalier de l'Alsace, le Bade-Wurtemberg est une création récente. Il est né en 1952, il y a tout juste 70 ans, de la fusion de deux entités plusieurs fois remaniées : le pays de Bade et le Wurtemberg.

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Le Land [région administrative, ndlr] du Bade-Wurtemberg n'existe que depuis 1952. Au cours des siècles précédant, les frontières n'ont cessé de bouger. 

En 1806 le Pays de Bade était un grand-duché, accolé au royaume de Wurtemberg et au petit Hohenzollern.

Après la Seconde Guerre mondiale, les alliés redessinent l’Allemagne, et les contours des régions du Sud-Ouest. 

Les zones d'occupations, en 1945 : en vert la zone britannique, en rouge la russe, en bleu la française et en jaune l'américaine
Les zones d'occupations, en 1945 : en vert la zone britannique, en rouge la russe, en bleu la française et en jaune l'américaine.
Les alliés ont poussé à la création du Bade-Wurtemberg
"L’impulsion a été donnée par les alliés : ils ont demandé aux ministres-présidents de l’Allemagne de l’Ouest, avant la création de la RFA, de former des Länder viables", raconte Christof Strauss, directeur des archives d'Etat à Fribourg.

En 1951, les citoyens sont appelés à donner leur avis lors d’un référendum : pour ou contre la création d’un grand Land du Sud-Ouest. Les affiches témoignent d’une campagne très virulente des Badois contre l’hégémonie du Wurtemberg.

Leo Wohleb est le dernier président du Pays de Bade et le plus farouche opposant à la création de la grande région. Christof Strass raconte : "Il disait : « nous allons disparaître dans ce Land du Sud-Ouest, nous serons en minorité par rapport au Wurtemberg, et nous allons perdre nos traditions et tout ce qui nous importe »".

 Le oui l’emporte et le Land du Sud-Ouest devient un an plus tard, le 25 avril 1952, le Bade-Wurtemberg. Les arrondissements badois, entre Karlsruhe et Freiburg ont été les plus opposés à la fusion.

Un nouveau drapeau a alors été créé, noir et jaune, pour réunir visuellement les deux entités constituant cette région : le pays de Bade et le Wurtemberg.

Le drapeau noir et jaune du Bade-Wurtemberg depuis 1952
Le drapeau noir et jaune du Bade-Wurtemberg depuis 1952.
Une association veille à l'équité
70 ans après la création du troisième plus grand Land d'Allemagne, une association continue de scruter les décisions prises à Stuttgart pour demander plus d’égalité de traitement entre pays de Bade et Wurtemberg, et un meilleur partage des finances publiques.

"Nous ne voulons plus faire sécession", explique Peter Koehler. "Mais nous remarquons que le pays de Bade reçoit souvent moins que le Wurtemberg, et que tout va toujours à Stuttgart. Et cette centralisation n’est vraiment pas obligatoire, dans un pays fédéral comme l’Allemagne et surtout dans une région qui a deux entités si fortes".

Le drapeau du pays de Bade flotte toujours sur le château de Karlsruhe. Car les Badois restent très fiers de leur identité et de leur histoire. Le pays de Bade a connu le premier parlement d’Allemagne. "Nous avons aussi eu la première constitution de tout le pays, ce sont des particularités intéressantes du pays de Bade à l’intérieur même de l’Allemagne", explique Peter Koehler, président de l'association Baden in Europa.

Le Bade-Wurtemberg est devenue l’une des régions les plus prospères d’Allemagne, avec un taux de chômage qui oscille entre 3 et 4%. Le succès économique a effacé les différends politiques, et chacun a gardé ses traditions, appréciées et reconnues dans le monde entier. (selon "Franceinfo")

21 octobre 2022

Turquie : une médaille vieille de 1.800 ans

Des archéologues ont mis au jour ce vestige dans l'ancienne ville de Perre, située dans la province d'Adiyaman au sud-est du pays.

turquieC'est un trésor vieux de 1.800 ans qui a été découvert par des archéologues turcs : une médaille militaire de bronze avec une tête de Méduse retrouvée dans l'ancienne ville turque de Perre (appelée aussi Perrhe ou Pirin), dans la province d'Adiyaman. Connue aussi sous le nom de Gorgô dans la mythologie grecque, Medusa était l'une des trois sœurs Gorgones avec Euryale et Sthéno. Mais Medusa était la seule à être mortelle. Et quiconque les regardait était changé en pierre.

Une force contre le mauvais œil

Alors que dans le grec ancien Medusa signifiait "gardien", son visage était très souvent utilisé pour symboliser la protection et son image est similaire au mauvais œil, aujourd'hui utilisé pour repousser les forces négatives. Medusa était aussi utilisée comme une ancienne amulette afin de protéger les gens contre les mauvais esprits. Le fait de transformer les gens en pierre était une de leurs caractéristiques principales pour éloigner le mal.

Les Gorgones, Medusa en particulier, était très souvent représentées sur les armures des empereurs et des généraux, mais également sur les sols faits de mosaïque en Grande-Bretagne, Égypte et sur les murs de Pompéi. Alexandre le Grand en avait une gravée sur son armure également. La légende dit aussi qu'Athéna (déesse de la guerre et de la sagesse) avait placé une Gorgone sur son bouclier afin de faire d'elle une guerrière encore plus redoutable.

Associé à une cérémonie militaire

Athéna a d'ailleurs en quelque sorte popularisé le visage de Medusa en mettant sa tête coupée sur son bouclier, et elle est devenue ensuite un motif populaire sur les armes défensives, rappellent nos confrères. Zeus et d'autres dieux ou déesses avaient utilisé sa tête sur leurs armes dans la mythologie grecque. Des fouilles vont se poursuivre dans la région pour tenter de retrouver des objets similaires.

"La médaille avec tête de Méduse qui a été retrouvée apparaît comme un prix décerné à un soldat pour son succès", a confirmé Mehmet Alkan, directeur du musée Adiyaman. "Il s'agit d'une médaille qu'un soldat porte sur son bouclier pendant une cérémonie militaire. Nous avons trouvé un diplôme militaire vieux de 1.800 ans pendant des fouilles l'an dernier, et nous associons donc la médaille au service militaire", a-t-il ajouté. (selon "GEO")

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15 octobre 2022

Pourquoi les Aztèques organisaient-ils des sacrifices humains ?

Pour eux, les sacrifices humains étaient une institution religieuse et politique. Pour autant, elle se retourna contre eux à l’arrivée des conquistadors au XVIe siècle.

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De part et d’autre d’un immense bûcher exhalant des vapeurs d’encens, deux armées se font face. Certains guerriers sont revêtus de justaucorps en peau de jaguar, d’autres sont recouverts de plumes d’aigle. Derrière leurs boucliers émergent des masques à l’effigie d’un dieu grimaçant ou d’une tête d’oiseau, des panaches aux couleurs vives… Les deux camps présentent des effectifs parfaitement identiques et s’affrontent suivant un cérémonial précis, sur un terrain neutre et sacré, dans ce qui pourrait s’apparenter à un tournoi médiéval. Le but de cette étrange bataille, appelée xochiyaoyotl (la «guerre fleurie»), n’est pas de tuer mais de capturer des ennemis pour les offrir, ensuite, en sacrifice au soleil.

Les Aztèques n’ont pas inventé ce rite. Il trouve son origine, si l’on se fie à l’historien d’origine indigène Chimalpahin (1579-1660), dans des pratiques plus anciennes et communes aux peuples de l’ancien Mexique. Dans ses Relations, écrites en nahuatl entre 1610 et 1631, il rapporte plusieurs épisodes de conflits rituels, survenus entre les Chalcas et les Tlacochcalcas en 1324. Il détaille aussi une «guerre tactique entre chefs guerriers » opposant les Aztèques et les Chalcas en 1378. Dans ces combats, seuls les «gens de services» – c’est-à-dire les simples soldats – pouvaient trouver la mort. S’ils étaient faits prisonniers, les nobles, qui eux ne s’entretuaient pas, étaient libérés à l’issue de la bataille.

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Les historiens ne font qu’émettre des hypothèses pour expliquer ces joutes : entraînement pour l’élite guerrière, moyen de maintenir les populations asservies sous pression, voire opportunité pour des dirigeants en place de se débarrasser de rivaux potentiels. Aucune de ces explications n’exclut les autres, d’ailleurs. Quoi qu’il en soit, c’est avec Moctezuma Ier, qui régna de 1440 à 1469, que la guerre fleurie prit une ampleur sans aucune mesure. Selon certaines sources, ces combats ritualisés trouveraient leur justification dans une série de catastrophes naturelles : nuées de sauterelles, en 1446, grandes inondations, en 1449, ou famine, en 1454. Les prêtres auraient alors réclamé davantage de sacrifices humains pour apaiser les dieux en colère. La guerre était le lieu idéal pour se fournir en victimes. «Le but des guerriers n’était pas en effet de tuer le plus d’ennemis possible mais de les capturer pour les sacrifier. Ainsi les soldats étaient suivis de spécialistes qui ligotaient les combattants ennemis jetés à terre. La bataille se transformait donc en une multitude de duels dont l’enjeu était la capture de l’adversaire», explique l’historien Pierre Crépon dans Les Religions de la guerre (éd. Ramsay, 1982).

Faire des prisonniers était le meilleur moyen de gravir les échelons de la hiérarchie militaire et devenir, distinction suprême, un «chevalier tigre» ou un «chevalier aigle». Un principe inculqué dès le plus jeune âge : «Ton devoir c’est de donner à boire au soleil le sang des ennemis» étaient les premiers mots qu’entendait le nouveau-né de la bouche de l’accoucheuse.

Mais dans les années 1450, l’Empire aztèque s’étendant déjà du golfe du Mexique jusqu’au Pacifique, les possibilités de conquête se faisaient moins nombreuses. Pour s’approvisionner en «eau de jade» et en «précieuses figues de barbarie de l’aigle» – autrement dit, en sang et en coeurs humains – sans sacrifier leurs troupes, les souverains de la Triple Alliance (Mexico, Texcoco et Tlacopan) auraient alors passé un accord avec les six cités-Etats de la vallée voisine de Puebla. Dans L’Empire aztèque : impérialisme militaire et terrorisme d’Etat (éd. Economica, 2001), le chercheur français Paul Hosotte rapporte les modalités de cette entente : «Le pacte prévoyait qu’à intervalles réguliers, dans des limites de temps bien définies, des adversaires se feraient la guerre, à la seule fin de se procurer des victimes pour les autels de leurs dieux respectifs, toute idée d’un bénéfice territorial quelconque étant exclue».

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Sous l’impulsion de Moctezuma Ier et de Tlacaelel, son frère et conseiller suprême, la guerre fleurie se trouva institutionnalisée. La vaste réforme religieuse mise en place au même moment faisait du peuple aztèque le peuple élu du soleil. Tlacaelel persuada les prêtres que l’astre du jour réclamait toujours plus de sang. Les sacrifices, déjà fréquents, atteignirent une échelle faramineuse. En 1487, les célébrations pour la rénovation du temple de Mexico-Tenochtitlán, la capitale de l’empire, en donne un ordre de grandeur : ils furent, selon certaines estimations, 80 000 à se succéder sur la pierre sacrée.

Certains chercheurs remettent en cause cette vision purement spirituelle et attribuent aux Aztèques des motivations plus matérialistes. C’est notamment l’hypothèse avancée par l’anthropologue américain, Ross Hassig, spécialiste des sociétés méso-américaines. Dans son ouvrage Aztec Warfare. Imperial Expansion and Political Control (University of Oklahoma Press, 1995), il insiste sur le fait que, même si elle était présente, la justification religieuse était avant tout une façon de masquer des buts politiques. Selon l’auteur, le contrôle de Mexico sur les autres cités s’avérait fragile et partout dans l’empire des révoltes menaçaient cette domination. Les combats rituels constituaient une entreprise de propagande destinée à démontrer la supériorité militaire de la capitale aztèque et la futilité de toute résistance. C’était aussi une guerre d’usure. En raison du faible nombre d’hommes engagés dans ces combats, les armées aztèques pouvaient maintenir une pression militaire sur leurs ennemis, à faible coût. «Une approche bon marché à un problème militaire persistant», conclut Ross Hassig.

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Frederic Hicks, de l’université de Louisville (Kentucky), doute lui aussi de la dimension uniquement sacrificielle de la guerre fleurie, dans Flowery war in Aztec History, un article publié sur le site spécialisé www.latinamericanstudies.org. Il s’interroge : pourquoi les puissantes cités de la Triple Alliance n’ont jamais soumis les petits Etats voisins de la vallée de Puebla, Tlaxcala, Huexotzinco et Cholula ? Faibles et désunis ces royaumes auraient pourtant été faciles à conquérir. L’hypothèse de Hicks est que les cités conquérantes n’ont tout simplement pas essayé. La guerre fleurie n’aurait été qu’une sorte d’entraînement des jeunes guerriers. Un empire fondé sur la conquête se devait de maintenir le niveau de ses troupes. C’est ce qu’aurait expliqué Moctezuma II lui-même. Dans la synthèse qu’il publia en 1590, Histoire naturelle et morale des Indes, le jésuite José de Acosta relate une conversation entre Cortés et l’empereur aztèque. Ce dernier déclare avoir voulu «exercer la jeunesse mexicaine pour qu’elle ne soit pas élevée dans l’oisiveté et le régal».

Quelles qu’aient été ses motivations, la guerre fleurie finit par se retourner contre ses inventeurs. C’est en effet une des raisons qui poussa les cités de la vallée de Puebla à combattre aux côtés d’Hernán Cortés et de sa poignée de conquistadors pour terrasser l’Empire aztèque.

Article paru dans le magazine GEO histoire n° 40 (Mayas, Toltèques, Aztèques).

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25 août 2022

Richard Cœur de Lion prisonnier à Haguenau

Capturé au retour de la 3e croisade, le roi d’Angleterre Richard Cœur de Lion a séjourné à plusieurs reprises à Haguenau. Il y a été en 1193 le prisonnier et l’hôte d’Henri VI, empereur du Saint-Empire romain germanique.

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L’histoire est racontée sur les monumentaux vitraux, signés Léo Schnug, qui trônent à l’entrée du musée historique de Haguenau. Le roi d’Angleterre Richard Cœur de Lion a effectué, contre sa volonté, plusieurs séjours dans le château impérial de Haguenau, la Pfalz.

 Il est arrivé là au terme de la 3e croisade, dans laquelle il s’était engagé en 1189 avec l’empereur du Saint-Empire romain germanique Frédéric Barberousse et le roi de France Philippe Auguste. Objectif : libérer Jérusalem, dont Saladin s’était emparé deux ans plus tôt.

Accusé d’avoir trahi les croisés

Mais rien ne se passe comme prévu. Frédéric Barberousse, parti aves ses troupes de Haguenau, se noie en Asie Mineure avant d’arriver en Terre sainte. Les rois d’Angleterre et de France réussissent certes à prendre Saint-Jean d’Acre mais les relations entre eux s’enveniment et Philippe Auguste décide de rentrer en France. Richard, qui ne parvient pas à reprendre Jérusalem et s’inquiète des vélléités de son frère Jean sans Terre de le détrôner, finit par négocier une trève avec Saladin et prend lui aussi le chemin du retour. Victime d’une tempête, son bateau fait naufrage et il est capturé par le duc Léopold d’Autriche, qu’il avait humilié lors du siège de Saint-Jean d’Acre.

Henri VI, le successeur de Frédéric Barberousse, exige alors la remise du prisonnier avec qui il est en conflit pour la possession de la Sicile. Il décide de le faire comparaître devant un tribunal impérial. Le roi d’Angleterre est accusé d’avoir mené des tractations secrètes avec Saladin et d’avoir détourné l’héritage de Sicile qui devait revenir à Henri VI.

Leopold conduit d’abord son prisonnier à Haguenau en février 1193. Puis il le livre en grande pompe à l’empereur le mois suivant à Spire où se tient une diète impériale. Le roi d’Angleterre est ensuite emprisonné au château du Trifels dans le Palatinat, propriété de l’évèque de Strasbourg, en attendant son procès dont l’une des audiences a eu lieu à la résidence impérale de Haguenau.

La sentence est prononcée à Worms : Richard doit payer la somme colossale de 100 000 marcs d’argent. En attendant son versement, Richard est à nouveau enfermé au château de Trifels. Il fera ainsi plusieurs allers-retours entre sa résidence surveillée où les conditions de détention sont parfois difficiles, et le palais de Haguenau, au gré de l’humeur de l’empereur qui s’agace de ne pas voir la rançon arriver.

Lors de l’un de ses séjours en Alsace, il évoque son sort dans une lettre adressée à sa mère, Alinéor d’Aquitaine : « Je viens d’être libéré de ma prison du Trifels et je peux désormais vivre et séjourner à la Cour impériale de Haguenau où l’empereur et son épouse Constance me reçoivent avec les honneurs ».

Une somme colossale

C’est là qu’il passera les derniers mois à attendre que les barons anglais finissent par réunir et par verser la rançon entretemps réévaluée à 150 000 marcs. Le roi d’Angleterre est finalement libéré le 4 février 1194 après un an et six semaines de captivité.

La légende raconte qu’il se serait alors rendu en pèlerinage en Alsace pour déposer ses liens symboliques de captif en l’église Notre-Dame de la Délivrance de Niedermunster, l’abbatiale romane située au pied du mont Sainte-Odile, avant de repartir pour l’Angleterre.

Ce qui est certain, en revanche, c’est que la fortune versée par Richard a permis à Henri VI d’organiser l’expédition militaire qui lui permettra enfin de prendre le contrôle du royaume de Sicile. Une expédition dont le départ a été donné en mai 1194 de Haguenau. (selon DNA du 16/8/22)

18 mars 2022

Le printemps de Prague

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17 mars 2022

Roumanie : Ceaucescu, le "génie des Carpates"

Il y a trente-deux ans, la chute

ceaucescuIl y a trente-deux ans prenait spectaculairement fin la dictature officiellement communiste la plus singulière d'Europe : celle, en Roumanie, de Nicolae Ceausescu, qui y avait associé étroitement son épouse Elena. Pour l'histoire officielle, c'est une insurrrection populaire qui en est venu à bout.

La séquence qui voit basculer en neuf jours la Roumanie en cette toute fin des années 80 devant le monde ébahi s’ouvre par une insurrection populaire. Elle se conclut – provisoirement - en mascarade judiciaire et en exécution sordide.

Le 25 décembre 1989 en milieu de journée, après trente-quatre années de règne, Elena et Nicolas Ceausescu, sont abattus comme à la sauvette d’une rafale de kalachnikov, après une heure d’un simulacre de procès. La première, à son dernier instant, conspue ses bourreaux. Le second chante l’Internationale.

Vite délivrées aux médias, des images montées du procès et de son issue font aussitôt le tour du monde comme pour signifier la fin d’une époque, deux mois après la chute du mur de Berlin.
Fruit de la guerre et de Yalta
Comme pour nombre de pays de l’Est, l’entrée 44 ans plus tôt de la Roumanie dans la sphère communiste découle de la Seconde Guerre mondiale. Invasion nazie, instauration d’un régime collaborationniste. Résistance. Retournement à la fois intérieur et extérieur. Appui et intervention de l’Armée Rouge. Victoire aux bons soins de l’Union Soviétique de Staline.

Dans la logique du partage de l’Europe - décidé un peu plus tôt à Yalta entre les alliés - le Parti ouvrier roumain (communiste) s'empare du pouvoir en Roumanie en mars 1945. Bien que son roi Michel ait résisté aux nazis, la monarchie est abolie deux ans plus tard. La République populaire roumaine est proclamée le 30 décembre 1947. Elle devient membre du Pacte de Varsovie, alliance militaire autour de l’URSS face à l’OTAN des Occidentaux.

Homme d’appareil d’origine modeste, Nicolas Ceausescu devient Secrétaire général du Parti ouvrier roumain en 1965, à la mort de son prédécesseur. Le titre vaut direction du pays ; ce n’est qu’en 1974 qu’il y ajoute celui de président de la République. D’abord classiquement aligné sur Moscou, son régime, au fil des ans, se distingue des autres pays « satellites » notamment par sa condamnation, en 1968, de l’intervention soviétique en Tchécoslovaquie.
Ceaucescu "Conducator"
C’est pourtant une dictature singulière qui se bâtit en Roumanie. Prenant le titre de « Conducator » (guide) emprunté à un prédécesseur fasciste, Ceausescu y associe étroitement son épouse Elena, scientifique. 

Passée de mode depuis la mort de Staline dans la plupart des pays « communistes », le culte de la personnalité atteint en Roumanie des sommets. « Génie des Carpates », « Firmament de l’Humanité », « Danube de la pensée », « Doux baiser de la terre »… Les médias nationaux rivalisent de superlatifs pour leur maître absolu.

Le Parti Communiste compte jusqu’à quatre millions de membres pour vingt-deux millions d’habitants. Une inflexible répression, assurée en particulier par la puissante Securitate, convainc les autres de se taire.

En 1984, plus de 500 hectares du vieux Bucarest sont rasés pour permettre l'édification d'un palais à l'architecture stalinienne supposé abriter l’ensemble des structures de pouvoir et leurs administrations : 365 000 mètres carrés, 1 200 pièces. Mobilisant selon une cadence pharaonique 20 000 ouvriers et 600 architectes, celui-ci sera bien bâti. Mais les Ceaucescu n’en profiteront pas.

Vent d’Est

Un vent nouveau s’est lèvé à l’Est en 1985, à la faveur de l’accession au pouvoir à Moscou de Mikhaïl Gorbatchev. Avec lui, des mots apparaissent : Glasnost (transparence), Perestroïka (changement, restructuration). Le mur de Berlin tombe en novembre 1989 et avec lui le rideau de fer. 

Gorbatchev échoue à convaincre Ceausescu de procéder à la mue qui pourrait le sauver. Le 3 décembre, lors d’une réunion du Pacte de Varsovie, c’est Ceausescu qui tance le président soviétique et lui inflige une leçon de stalinisme. Selon l'historienne Catherine Durandin (1), Moscou donne alors son feu vert à la chute d’un régime que nombre de ses cadres – y compris de son appareil sécuritaire – ne veulent plus défendre. 

Insurrections

ceaucescu4La révolution commence à Timisoara, grande ville de Transylvanie, tout à l’Ouest du pays et proche des frontières yougoslaves et hongroises. Le 16 décembre, une foule prend la défense d’un pasteur protestant menacé de déplacement administratif par la Securitate.

Dans la soirée, la protestation vire à l’émeute. Les forces armées ouvrent le feu. Grève des grandes entreprises le lendemain. L’émeute devient insurrection. La répression se poursuit mais, le mercredi, des fraternisations ont lieu entre soldats et manifestants.

Un comité révolutionnaire prend le pouvoir. Timișoara est déclarée le 19 décembre première « ville libre » de Roumanie. Les combats font entre cinquante et cent morts, très loin des milliers inventés par des médias occidentaux (voir encadré).

Timisoara n’est pas la seule ville en proie aux troubles mais les récits de son émeute, amplifiés par les radios étrangères, gagnent la capitale Bucarest.

Le 21 décembre, un rassemblement de masse y est organisé par le régime. Il tourne à la manifestation hostile de plus de 100 000 personnes. Ceausescu, venu se faire acclamer à son retour d’un voyage officiel en Iran y est hué et doit se retirer.

Dans la soirée, des chars prennent position dans la ville en ébullition. Vers minuit, des blindés légers ouvrent le feu : trente-neuf morts.

  Cavale

Le lendemain, la foule investit le siège du Parti communiste. Le couple présidentiel fuit à bord d’un hélicoptère après avoir menacé le pilote. Peut-être faute de carburant, l’hélicoptère se pose à une cinquantaine de kilomètres. Selon, une autre version, le pilote était contrôlé par la Securitate, qui aurait décidé de livrer les Ceausescu. Ces derniers seront finalement arrêtés dans l’après-midi du 22 décembre par des militaires ralliés au changement– non sans quelques heures d’hésitation selon certains récits - puis transférés sur une base militaire. La nouvelle se répand.

A Bucarest, des groupes armés s’opposent dans une complète confusion. Une structure et quelques figures émergent dans les derniers jours : le Front du Salut National, un petit groupe clandestin d’opposants constitué durant l’été précédent ; Ion Iliescu, son fondateur, communiste gorbatchévien ; Petre Roman ingénieur formé en France. Ils sont rejoints par des éléments du régime et de la Securitate.

Le 24 décembre, alors que des combats sporadiques se poursuivent dans la capitale, une grande part des forces de répression opère sa conversion à la « démocratie ». Le Front du Salut National, lui, renonce au socialisme. 

Mascarade

C’est pourtant bien à la « stalinienne » que sont jugés, le 25 décembre, Nicolae et Irina Ceausescu. Tribunal improvisé dans la base militaire où ils sont détenus, composé de de trois hommes du régime. L’un d’eux est l’organisateur du procès : le général Victor Atanasie Stănculescu, qui a fait tirer sur la foule les jours précédents. Audience secrète mais filmée. Elle dure près d’une heure et demi mais les images enregistrées n’en retiennent que 55 minutes.

Le couple est accusé, notamment, des "massacres" de Timisoara. Un peu hagard, il semble ne pas comprendre la situation. Il récuse – non sans raisons – la compétence du Tribunal. Elena, en particulier, insulte ses juges. Ceux-ci, de leur côté soutiennent une accusation décousue.

La sentence est sans surprise, et sans appel : la mort. Elle est exécutée immédiatement à l'extérieur de la salle. Des images montrent les visages éteints des anciens maîtres de la Roumanie.

 

16 mars 2022

Pologne : il y a 40 ans, le général Jaruzelski décrétait l’état de guerre

Le 11 décembre 1981, devant la montée des aspirations démocratiques impulsées par Solidarność, le gouvernement, impuissant, proclame la loi martiale. La bataille du syndicat de Lech Walesa déclenchera une vague de révolutions pacifiques anti-communistes en Europe de l'Est, aboutissant à la chute du bloc soviétique en 1989.

pologne3La bataille polonaise contre le pouvoir communiste, contrôlé par Moscou, démarre à l'été 1980 par une grève générale initiée par les ouvriers des chantiers navals de Gdansk, qui protestent contre la pénurie de vivres et le manque de démocratie. Le mouvement paralyse le pays.

Accords de Gdansk

Le 31 août 1980, Lech Walesa, leader de cette fronde, à la tête du syndicat ouvrier indépendant Solidarność (Solidarité), signe avec le gouvernement communiste les accords de Gdansk pour mettre fin aux troubles. Ces accords prévoient notamment des augmentations salariales, la semaine de travail de 5 jours, le droit de grève, l'autorisation de création de syndicats indépendants et la reconnaissance officielle du syndicat Solidarność, effective le 24 novembre 1980.

Mais les promesses ne sont pas tenues. Grèves et violences reprennent de plus belle. Devant la montée des aspirations démocratiques, le gouvernement, impuissant, proclame l’état de siège le 13 décembre 1981 : “La Pologne sous la botte polonaise”, titre la une de “Sud Ouest”, le 14 décembre.

pologne4Officiellement le décret se voulait une réaction à la difficile situation économique et à la menace sur la sécurité énergétique du pays. Dans la réalité, le régime communiste polonais redoutait la perte du pouvoir, notamment face au rôle grandissant du syndicat Solidarność et ne voulait pas une répétition de l’invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes du Pacte de Varsovie en 1968. 6 000 syndicalistes sont arrêtés, y compris le populaire Lech Walesa, et  Solidarność, fondé dix-huit mois plus tôt est dissous. L’émotion est immense dans le pays comme en Occident. La loi martiale restera en vigueur jusqu’au 22 juillet 1983. Tout au long de cette période, les Polonais souffriront des restrictions des libertés dans leur vie quotidienne. Un certain nombre d’entre eux prendront la douloureuse décision de quitter leur pays, quitte à ne pas pouvoir revoir leur famille et leurs amis durant plusieurs années.

La bataille de Solidarność pour la démocratie durera huit ans, jusqu'aux accords historiques signés le 5 avril 1989 entre les communistes au pouvoir et le syndicat ouvrier.

pologne2Ils prévoient la création d’un véritable poste de Président de la République, la restauration du Sénat, l’instauration d’un Conseil national de la magistrature, la clarification des pouvoirs de la Diète (Chambre des députés) et surtout, une nouvelle loi électorale qui devait permettre plus de pluralisme et de liberté aux électeurs.

Enregistré comme parti légal le 17 avril, Solidarność triomphera aux élections législatives des 4 et 18 juin 1989. Lech Walesa, lauréat du prix Nobel de la Paix en 1983, succèdera au général Wojociech Jaruzelski à la présidence de la Pologne, de 1990 à 1995.

Illégal

Après la chute des régimes communistes en Europe, le parlement polonais a admis en 1992 que la proclamation de l’état de siège en 1981, était illégale. Le 17 avril 2007, les responsables de son instauration en Pologne (les généraux Wojciech Jaruzelski, Czesław Kiszczak et sept autres personnes) ont été officiellement inculpés pour « crime communiste ».

 

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