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Différences : le blog de Jean-Louis BOEHLER
17 novembre 2009

Massif du Donon : la guerre de 1870/71 n'est pas finie

donon138 ans qu’ils ne désarment pas. 138 ans qu’ils réclament justice. Depuis plus d’un siècle, les maires successifs de Raon-lès-Leau (54) et Raon-sur-Plaine (88), deux minuscules communes lorraines à la frontière avec l’Alsace, se battent pour recouvrer leurs droits sur 2 000 hectares de forêts. Dans la région où le textile a fait naufrage, et les industries se font rares, le bois vaut de l’or. Après la guerre de 1870, la Prusse victorieuse a redécoupé la carte de l’Alsace et de la Lorraine et ces deux communes se sont vues annexées sous l’effet du Traité de Francfort. «Nos aïeux étaient des durs à cuire. C’était un pays de bûcherons. Pas question pour eux de devenir prussiens ! Les Allemands avaient pris nos forêts, nos scieries. Et la nuit, les gens d’ici creusaient des tranchées au milieu de la seule route qui permettait le transport du bois », raconte Etienne Meire, maire de Raon-lès-Leau. Après sept mois de cette guerre d’usure avec les Prussiens, les deux villages ont obtenu de rester français. Le 2 juin 1871, le général Von Moltke lâche du lest sur un point, mais conserve l’essentiel sur instruction d’un Bismarck intraitable : il garde les forêts plantées de sapins noirs. Un état de fait qui, quelques années plus tard, après une autre guerre, celle de 14-18 ne sera jamais corrigé. Le Traité de Versailles les néglige. Les 2 000 hectares de forêts giboyeuses dont ils ont été amputés restent dans le giron de la commune de Grandfontaine (Bas-Rhin). Ainsi, après avoir disposé d’eux, on les a oubliés… Au sentiment d’injustice né de la spoliation, s’ajoute celui de ne pas être entendus. Mais cette fois, Etienne Meire, maire de Raon-lès-Leau, 45 habitants, et Antoine Quirin, maire de Raon-sur-Plaine, 157 âmes, reprennent du poil de la bête. Un avocat a accepté de prendre en charge leur cause, «au nom de l’éthique et de la morale» sans demander le moindre sou aux deux communes désargentées. Me Behr va attaquer, devant le tribunal administratif, l’Etat français. Les communes réclament la restitution des terrains qu’on leur a confisqué, ou à défaut, une indemnité compensatoire.

«Charité publique»

Dans la mairie de Raon-lès-L’eau, petit PC de bataille avec vue sur la montagne, les dossiers sur l’affaire s’empilent. Sans désemparer depuis toutes ces années, les conseils municipaux ont voté des délibérations restées lettre morte. «Nous n’avons eu que des réponses polies dans le meilleur des cas. Ils bottent en touche, nous disent que ce serait trop compliqué de redécouper les frontières de trois départements et deux régions. Vous pensez bien que de l’autre coté, ils ne veulent pas entendre parler de restitution », note Antoine Quirin. Dans ces villages de la vallée de la Plaine, exsangues, les habitants se sentent concernés et sont solidaires dans la lutte. «La perte de nos forêts a marqué le début du déclin car tout le monde vivait du bois. Ça a été l’exode rural. Raon-sur-Plaine a perdu 1 200 ha, les deux tiers de son territoire et Raon-lès-Leau a été amputée des neuf-dixièmes. On n’a plus de ressources, on vit de la charité publique », soupire Etienne Meire. Autant dire que les revenus fonciers estimés d’une forêt communale retrouvée, 70.000 €, seraient une sacrée bouffée d’oxygène pour les deux communes sacrifiées.

(extrait du "Républicain Lorrain")

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