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Différences : le blog de Jean-Louis BOEHLER
8 avril 2013

Il y a 500 ans, le Bunschuh et la guerre des paysans en Haute-Rhénanie

bundschuh« La révolution est une idée qui a trouvé des baïonnettes. » Napoléon Ier l’a dit trois siècles après, mais ces mots s’appliquent à la fin du Moyen Âge, entre 1493 et 1525, où l’Alsace était enflammée par la guerre et la violence radicale. Le mot « révolution » s’applique typiquement aux mouvements qui ont réussi, car ce qui est révolutionnaire est le bouleversement des normes anciennes – des changements globales, réalisés vite. Pourtant, l’Alsace a vu des soulèvements écrasés qui ont néanmoins laissé une influence révolutionnaire et imperméable sur la société et l’avenir de la région. Pendant ces révoltes, appelés par le nom Bundschuh – le soulier à lacet, symbole populaire – les roturiers de la campagne alsacienne se sont organisés, formant les armées dans la lutte pour le changement politique, social et religieux. Le climax est venu en 1525, où presque toutes les régions méridionales du monde germanique ont vu le Deutscher Bauernkrieg – la Guerre des paysans allemands – un conflit qui, selon Georges Bischoff, « n’a pas d’équivalent dans l’histoire de l’Europe. » Désormais, ces évènements existaient dans la mémoire et l’histoire des Alsaciens et des autres, et en plus constituaient certains des enjeux les plus essentiels pour comprendre le passage d’Alsace entre l’époque médiévale et l’époque moderne. 

L'Alsace au seuil du bouleversement

intro_gemetzel_picture_gLe 23 mars 1493, à la montagne d’Ungersberg en moyenne Alsace, une trentaine des participants, venant des environs, ont fait un serment d’unité et de dévotion pour leur cause – l’achèvement violent des buts communs : supprimer des tribunaux ecclésiastiques et impériaux, interdire le cumul des bénéfices ecclésiastiques, et enfin expulser les Juifs. Depuis quelques saisons leur projet aurait été en train d’être organisé, pourtant les autorités ont découvert la conspiration bientôt après le rendez-vous à Ungersberg. Quelques étaient arrêtés par les agents de l’évêque de Strasbourg, quelques par les villes impériales de Sélestat et Obernai. La procédure était fermée vers la fin de juillet, les paysans condamnés aux amendes et éventuellement la mutilation de la main droite. La seule violence commise était par les cours, mais l’idée du Bundschuh est né. 

Le deuxième Bundschuh se produit en avril 1502, près de Bruchsal, nord-est de Karlsruhe. Malgré la distance géographique et temporelle – neuf ans ! – entre la conspiration d’Ungersberg et celui-ci, la preuve de la puissance de l’idée et du terme Bundschuh dans la région rhénane se trouve dans la vitesse très rapide parmi les gens et les autorités de faire la liaison entre les deux complots. En fait, lorsque les nouvelles sont diffusées de Spire vers le sud, un réseau des villes alsaciennes a mobilisé immédiatement pour combattre la menace possible. Pendant l’été, trois réunions à Sélestat des représentatives gouvernementaux verraient la discussion et l’implémentation des plans concrets pour la prévention des soulèvements dans l’avenir. Comme avant, le complot a fini très rapidement avec la découverte et arrestation des responsables, suivi par des exécutions, des mutilations et des bannissements, avant de la mise en œuvre du projet. Cette fois, pourtant, les buts articulés, connus par dit-on, étaient moins ésotériques : de prendre le pouvoir par force, contre les prêtres et les nobles – selon Bischoff, « au nom de Dieu des pauvres contre l’Église des riches ». 

Le dirigeant de la conspiration de 1502, un serf et un mercenaire appelé Joss Fritz, a évité l’arrestation et en 1513 il est apparu encore, avec un parti révolutionnaire plus complexe et des objectifs plus radicaux. Son affaire de 1513 se manifeste à Lehen en Brisgau avec une propagande forte et un message de l’imposition des prêts gratuits, le partage des biens superflus pour le profit communal, le plafonnement des ressources et l’usage libre des eaux et des bois. Cependant, le soulèvement était terminé avec la capture de la majorité des compatriotes de Fritz par les Bâlois, tandis que les autorités réactivent les mesures décidées en 1502. Cinq ans après, Fritz a frappé encore, cette fois sur les deux côtés du Rhin. Le plan en 1517 s’est concentré sur la diffusion des agents aux villes et villages en Alsace et dans la Forêt Noire, afin de les prendre dans une façon coordonné et puis installer un nouveau régime, commençant avec l’abolition de tout autorité sauf l’empereur et le pape, l’expulsion de la noblesse et la chevalerie, et la requête d’aide des cantons suisses. Cependant, le mouvement était arrêté encore, avant d’achever d’ampleur, et depuis on perd la trace de Joss Fritz dans l’histoire. 

Finalement, après ces quatre conspirations échouées appelées par le nom Bundschuh, on arrive en pleine guerre – la guerre des Paysans allemands. Il faut comprendre que plusieurs autres troubles et épisodes de violence ont eu lieu en Alsace et en la région rhénane entre 1493 et 1525, mais malheureusement on n’a pas d’espace pour les examiner. En tout cas, leur culmination est venue avec le Deutscher Bauernkrieg, une irruption immense du monde germanique, née en Bade pendant l’automne de 1524. Commençant pendant la semaine de Pâques en 1525 à mi-avril, les mouvements insurrectionnels et violents ont éclaté dans la campagne et dans les villes sur la rive gauche du Rhin. Les événements centraux ont duré environ un mois et demi, avec des pillages, l’organisation des grandes bandes, et la prise des villes et des châteaux. La guerre a pris pour message les Douze Articles, articulés en Souabe, qui contenait à la fois des revendications sociaux le long des thèmes communs – la suppression des tribunaux, des taxes et des privilèges de la noblesse, l’établissement de la suprématie des pouvoirs locaux, le partage des terres communs – et aussi une base spirituelle, justifié par le Réforme. 

En Alsace, la guerre a continué avec grand succès jusqu’à mi-mai ; les seigneurs étaient complètement impotents et se sont cachés dans leurs châteaux. Entre le 4 et le 11 mai, même, une sorte de congrès était convoqué à Molsheim avec les représentatives des toutes les bandes. Pourtant, l’arrivée de l’armée du Duc de Lorraine a entrainé des défaites sanglantes, comme au massacre de Saverne, le 17 mai et à Scherwiller, le 20. Malgré la continuation de la guerre, particulièrement en Haute Alsace et dans la Forêt Noire, l’écrasement violent et complet des paysans, fini par les armées de l’Empire, était bien inévitable. Les actions des paysans allemands ont frappé presque toutes les régions méridionales de l’Empire, mais à la fin elles ont toutes connu des conclusions mortelles. On estime que cent milles étaient tués. 

Une figure du "Bauernkrieg" : Jos Fritz

fritzQui est Jos Fritz, le "chef des rebelles paysans" de 1513 ? Un propriétaire terrien du Pays de Bade, et puis ? On ne sait pas beaucoup de choses en plus. Il n'existe qu'une image de lui sur une affichette datant de 1535. Et c'est tout ! Nous ne savons rien de lui directement, il existe juste quelques écrits, comme des rapports de police. Et pourtant son nom est évoqué dans de nombreux "Volkslieder" (chants populaires). Selon les uns il serait originaire de Whyl, mais il est plus probable qu'il soit né à Bruchsal vers 1470. Il fut l'animateur de nombreuses "conspirations du Bundschuh". Il était présent à la bataille de Lehen (aujourd'hui un quartier de Fribourg-en-Brisgau).  Mais Jos Fritz réussit à s'échapper. La police de la ville de Fribourg le rechercha pendant des années sans le trouver. Il vivait caché dans le Kaiserstuhl... 

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Commentaires
D
Très instructif:<br /> <br /> <br /> <br /> Vous serez surpris que le 3è guerre mondiale a commencé sans dire son nom et sous silence des médias. <br /> <br /> Les preuves sont ici:<br /> <br /> <br /> <br /> http://www.internationalnews.fr
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G
Le "nouveau Bundschuh" a eu hier : mais cette fois les "seigneurs d'Alsace" ont été battus ! Merci Philippe Richert !
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