La galère pours’approvisionner en nourriture
Cuba s’enfonce dans la crise alimentaire. Sans tourisme, avec des dépenses pour affronter la crise du coronavirus et des sanctions américaines accrues, l’économie cubaine manque de devises. Le pays importe 70% de son alimentation et le gouvernement parvient difficilement à financer ses importations, le quotidien des Cubains est désormais aux pénuries, aux rationnement et aux files d’attente.
Le soleil n’est pas encore levé, mais déjà plusieurs dizaines de personnes font la queue avant même l’ouverture des magasins, des banques ou des pharmacies. Les files d’attente sont désormais partout !
Leonardo Gonzalez est assis sur le trottoir, comme lui plus de 100 personnes attendent d’entrer dans cette boutique en devises, ici il y a du shampoing, un produit que Leonardo n’avait pas vu en magasin depuis deux mois. « Dans les magasins en monnaie cubaine tu ne trouves rien, ici tu fais la queue mais au moins il y a quelques produits ! »
L’ouverture des magasins en devises depuis juillet dernier est une des solutions mise en place par l’État pour récupérer des dollars et financer ses importations. Mais tous les Cubains n’y ont pas accès.
À l’angle de la place, justement, un magasin en monnaie cubaine, ici il n’y a pas beaucoup de monde, ce qui indique qu’il n’y a sans doute pas beaucoup de produits, Mercedes Morena Agueyo sort avec un petit sac en plastique. « Aujourd’hui il y a du fromage et du jambon, il y a différents produits, pas beaucoup mais il y en a ! Parfois la queue est beaucoup plus longue ! S’il y a du poulet c’est très long, si c’est de l’huile beaucoup plus ! »
Pour un litre d’huile, dans cette ville de l’est de l’île, il faut faire la queue dès la veille. Cette petite dame au dos vouté travaille « pour le peuple », comme elle dit, dans une bodega, l’une de ces épiceries où l’État distribue à des prix subventionnés une certaine quantité de riz, de café, de sucre et de grains. Cela ne suffit pas à se nourrir durant un mois entier, mais c’est une aide non négligeable selon Mercedes Agueyo. « Il faut essayer de survivre comme on peut, mais il apparait toujours quelque chose à manger. Le monde entier est dans cette situation, ce n’est pas seulement Cuba ! »
La FAO estime que la crise du coronavirus pourrait entraîner plus de 83 millions de personnes dans des conditions d’extrême pauvreté et de famine en Amérique latine et dans les Caraïbes. Et Cuba ne fait pas exception, malgré les aides de l’ONU et de l’Union européenne.
Excédé, collé-serré, abrité du soleil sous des parapluies rafistolés, un groupe de femmes fait la queue pour acheter du savon, l’ambiance est clairement tendue, personne ne souhaite s’exprimer au micro, mais Marisa Gonzalez finit par lâcher : « Ici ce qu’il faut c’est qu’on nous enlève le blocus, pour qu’il y ait plus d’approvisionnement ! C’est tout ! Parce qu’ici tout le monde est libre et nous vivons heureux sur cette île ! »
Mais ces files d’attente ne respirent pas le bonheur et les pénuries n’ont jamais été aussi dures en 60 ans de blocus américain.
Depuis le mois de février, le jeune Ramon qui travaille dans un magasin et n’a pas le droit de s’exprimer, ne voit pas s’améliorer la situation.
« Il y a toujours des problèmes dans la queue, les gens s’énervent, il fait chaud, il y a du tumulte. Depuis qu’il y a le coronavirus l’entrée des marchandises a vraiment beaucoup diminué. Ils nous ont dit que l’approvisionnement devrait revenir à la normale quand le monde -avec ce problème de coronavirus- reviendra à la normale ! »
Mais la crise du coronavirus n’explique pas tout et le gouvernement a annoncé un grand plan de souveraineté alimentaire, un discours que beaucoup de Cubains ont déjà entendu à plusieurs reprises ces dernières décennies. (selon RFI)