Ce mercredi, s'est tenue une réunion publique dans le cadre de l'enquête d'utilité publique pour la réalisation du contournement de Châtenois. Voici l'intégralité de mon intervention :
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10 ans de passé depuis la dernière enquête publique avortée au Tribunal Administratif, sans même que les autorités compétentes ne fassent appel ! On nous expliquait à l'époque que les travaux avanceraient plus vite si l'on ne faisait pas appel, mais qu'on recommencerait la procédure ! Voilà le résultat ! 10 ans de perdu ! Alors soit ! Analysons le dossier de l'enquête actuelle :
Le positif : c'est que l'essentiel du projet est maintenu pour une route à 2x2 voies, indispensable au vu du trafic : 20000 véhicules/jour, contre 17000 en 2002 ! Les doléances des viticulteurs ont eu gain de cause : on peut se demander si les modifications mineures n'auraient pu être prises en compte dès la première enquête ! Au niveau de l'écologie (Alsace-Nature avait aussi déposé un recours), sur 307 pages, l'étude en réserve plus de la moitié à l'environnement.
Des études acoustiques certes, mais aussi des études très détaillées sur la flore et la faune. Ainsi on a passé le temps à répertorier les chauves-souris, la mésange-charbonnière, le gobe mouches à collier, le cincle plongeur, le grand corbeau, les amphibiens, la bécassine des marais, le blaireau, le putois, les lézard, les papillons ! Et à la longueur qu'ont mis les études à se réaliser, on a dû étudier une espèce par an ! Il y a eu, un peu comme en Chine, l'année du crapaud, l'année du hérisson, etc... Enfin soit, le dossier va avancer ! Ce serait là l'essentiel, si cela permettait de convaincre certains de ne pas se lancer dans de nouveau recours, ce dont je doute !
Les points négatifs : On oublie l'essentiel : Depuis 1976, c'est à dire depuis l'inscription de cet axe Fribourg – Marckolsheim – Sélestat – Ste-Marie-aux-Mines – Saint-Dié - …. Paris dans le Schéma d'Aménagement du Territoire de la Région Alsace, 87 morts, c'est le triste bilan humain entre Sélestat et Ste-Marie-aux-Mines ! A petites doses, autant que le crash du Mont Sainte-Odile ! Pas un cimetière du secteur qui ne voit y reposer des victimes de la RN 59, certes souvent liées à des fautes humaines, mais aussi à l'incohérence et l'inadaptation de l'infrastructure au trafic ! Et pour la sécurité routière, dans ce dossier : pas beaucoup, sinon rien !
Le tronçon Lièpvre – Châtenois, où l'étude d'une nouvelle route et l'achat des terrains étaient inscrits au contrat de plan Etat – Région 2000 – 2006, semble abandonné : « La route est sinueuse et aux caractéristiques hétérogènes, traversant des hameaux et des sites industriels. Toutefois l'évolution du niveau de trafic et le niveau de sécurité de cette section de la RN 59 ont permis de réinterroger les conclusions de l'APSI et montrent que des aménagements complémentaires sur ce tronçon ne sont pas nécessaires. » Et tout cela pour un tronçon appelé à accueillir 13000 véhicules/jour, qui certes ne justifient pas forcément une 2x2 voies mais ne permettent pas le réaménagement de la route actuelle (1 accès tous les 40 mètres), Rien n'est donc prévu de la jonction du contournement de Châtenois vers un nouveau tracé Val-de-Villé – Lièpvre pour lequel l'Etat et les collectivités territoriales se sont pourtant engagés ! Au point que même le rapport commandité par la DRE auprès de l'organisme privé MENSCOM n'est joint au dossier ! Qu'est devenue la notion de conduite apaisée, si chère à tous les organismes de sécurité routière, qu'on ne peut plus appliquer sur la route actuelle ?
Enfin, relevons l'incohérence globale : on veut une « route express », un itinéraire à vocation interrégionale et locale, sans tenir compte du tunnel de Ste-Marie-aux-Mines réalisé dans le cadre d'un grand axe économique est-ouest en 1976 !
Et j'en arrive là à un autre point faible du dossier ! La seule étude économique consiste à se rendre compte de la baisse de chiffre d'affaires d'une station services ! Rien sur les fermetures dans les vallées, qui augmentent le nombre d'usagers-salariés sur la RN59 et la D424 qui se rejoignent à Val de Villé ! Je donnerai un chiffre : en 2003, 52 % des actifs du Val de Villé quittaient tous les matins la vallée pour y revenir tous les soirs (dossier du conseil général « Hommes et Territoires »). Aujourd'hui c'est 58 % ! Rien sur la zone industrielle du Danielsrain occupée par les gravats du tunnel, rien sur les zones artisanales comme celle de Maisonsgoutte qui ne trouvent pas preneur !
Je concluerai : alors, vite, réalisons ce contournement à 2x2 voies, dans l'état actuel du dossier, mais n'oublions pas qu'il n'est pas une fin en soi, mais une étape nécessaire mais insuffisante pour le développement de nos vallées, et même tout le Centre-Alsace !