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Différences : le blog de Jean-Louis BOEHLER
15 avril 2014

Grèce : après 6 ans d'austérité, retour à la terre

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Cela fait maintenant six ans que la Grèce est en récession et quatre qu’elle subit la cure d’austérité sans précédent imposé par la Troïka. Le chômage, qui a explosé pendant la crise, est, de loin, le plus élevé de la zone euro. Selon Eurostat, il s’élève aujourd’hui 27,5% et dépasse les 58% chez les jeunes.

L’une des rares portes de sortie pour échapper au conséquence de la crise, c’est le retour à la terre. Pas si étonnant quand on se souvient que l’agriculture est resté le premier secteur de l’économie grecque jusque dans les années 1970 avant de perdre progressivement du terrain face à l’industrie et aux services.

Si on a du mal à le chiffrer avec certitude, le ministère de l’Agriculture ne faisant aucun recensement - et aucune déclaration n’étant nécessaire a moins de vouloir toucher d’hypothétiques subventions - le phénomène est réel. Des estimations officieuses de divers organismes syndicaux parlent d’environ 40.000 nouveaux paysans depuis 2010. La plupart sont des jeunes qui se sont retrouvés sans emploi à cause de la crise et qui refusent de rester les bras croisés à attendre la reprise, estime Ilias Kantaros, agronome.

Giannis fait partie de ceux-là. Il y a encore deux ans, il possédait sa petite entreprise de panneaux photovoltaïques. Il avait eu l’idée de ce business alors qu’il était encore à l’université. À l’époque, l’État grec mettait en avant le développement des énergies renouvelables et promettait une carrière assurée et riche en revenus à tous ceux qui choisiraient de se spécialiser dans ce secteur d’activités.

Il a finalement repris l’exploitation de son grand-père décédé il y a quelques années et aujourd’hui, il produit et vend des citrons et des oranges. Malgré divers programmes d’aide annoncés par le gouvernement pour tous ceux qui comme lui commencent dans l’agriculture, il ne s’est toujours pas officiellement déclaré auprès de l’État. « Cela risque davantage de me coûter cher que de m’aider », se justifie-t-il.

Pour vendre ses produits, Giannis utilise la licence d’exploitation de sa mère. Au cours de sa première année complète d’activité, il a réussi à gagner assez d’argent pour pouvoir vivre de son activité. Et surtout, « ce mode de vie me plaît », insiste-t-il. « On en revient l’essentiel : l’air frais, la nature, l’activité physique. Mon grand-père serait fier de moi ! ».

Rien ne vaut les escargots

Cependant, cette mode du retour à la terre n’est pas sans danger car si les possibilités de reconversion sont réelles, il faut aussi faire attention aux miroirs aux alouettes. « De nombreux conseillers mal intentionnés profitent de l’angoisse des personnes qui se retrouvent soudainement sans ressources pour leur proposer des cultures qui ne sont pas viables financièrement en Grèce », souligne Ilias Kantaros.

Ces cultures, ce sont surtout les autres produits exotiques, dont la demande est très faible sur le marché grec. D’autant que leur coût de production en Grèce est bien supérieur à celui d’autres pays du monde. Des informations qui ne sont jamais données aux nouveaux agriculteurs. En réalité, investir dans les cultures traditionnelles (blé, lentilles, etc) s’avère un investissement beaucoup plus sûr.

La seule exception à cette règle qui a fait ses preuves, c’est l’élevage d’escargots. La raison en est simple : la demande dépasse encore l’offre au niveau mondial. Il y a donc l’assurance de pouvoir écouler ses produits quoi qu’il arrive. Aggeliki Miha, 33 ans, produit des escargots depuis bientôt trois ans. Croupière au casino de Loutraki pendant les « belles années » de l’économie grecque, elle s’est retrouvée au chômage en 2009.

En 2011, lassée de chercher en vain un travail décent, Aggeliki décide d’investir toutes ces économies pour devenir productrice d’escargots. Pour ce faire, elle demande à son père de lui céder un bout du terrain familial et loue une parcelle de terrain supplémentaire pour pouvoir produire dès la première année deux à trois tonnes. Elle a en outre dû revenir vivre chez ses parents dans son village natal de Perahora avec ses deux enfants. Son mari, lui, est resté à Thèbes où il continue a travailler dans une usine.

Depuis, Aggeliki a avancé, mais elle reste loin du compte. Des erreurs de débutante dues à l’envie d’avancer plus vite que possible lui ont valu des productions bien plus réduites que prévu les deux premières années. Elle garde néanmoins espoir : elle a vendu tout ce qu’elle a produit.

Désormais bien implantée dans sa région, elle est invitée à des conférences pour donner des conseils à ceux qui voudraient tenter la même aventure. « C’est une forme de reconnaissance qui me fait réellement plaisir. Et j’espère réellement aider des gens à ne pas faire les mêmes erreurs que moi ». Une mentalité d’entraide qui sera bien essentielle pour bâtir la Grèce de demain…

(Le Courrier des Balkans)

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C
Ce pays mériterait qu'il sorte de l'Euro pour qu'il retrouve des marges de manœuvre dont-il ne dispose plus actuellement
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